Dure journée. Les fantômes ne la laissaient pas en paix. Apparaissant et disparaissant tour à tour, sans prévenir. Ça la rendait folle. Lanawyn n'était pas là, était partie dans la matinée et n'était toujours pas rentrée. Elle avait encore plusieurs heures à tuer. Une migraine à attraper. Et des fantômes à oublier. Alors une fois n'était pas coutume, elle irait se prendre un verre.

Traversant la forêt, elle gagna Flamdone, s'avança dans les rues à la recherche d'un bar, d'une taverne, quoi que ce soit qui vendrait de l'alcool. Elle finit par trouver ce qu'elle cherchait, en poussa la porte. Aussitôt, pas mal de regards se tournèrent vers elle. Des vampires. Ils étaient plutôt contents de cette surprise, de cette présence féminine inespérée et à l'odeur particulièrement alléchante ; eh oui, le sang des Loups Firosia quoi. Elle ne s'en préoccupa pas. Peu lui importait ce soir. Elle voulait juste oublier. Tout oublier.

Elle s'avança, se dirigea vers le bar sans hésitation. Et son sang se glaça en y reconnaissant une silhouette. Elle eu un temps d'hésitation, et si elle avait eu l'espoir qu'il n'ai pas remarqué son entrée, peut-être qu'elle aurait encore fait demi-tour. Elle finit par s'asseoir à côté de lui en saluant le barman d'un signe de tête.

Sa voix était glaciale. Cynique à souhait. Elle n'avait pas envie de l'affronter ce soir, mais puisqu'il était là... Elle soupire, fait de son mieux pour prendre sur elle. Commande une vodka qu'elle boit aussitôt cul-sec, offrant tout de même un signe de verre à son compagnon de tournée. Johann Faust.

Malgré le ton de la Louve, il lui rendit son signe de verre et le but également. On les leur remplit rapidement. Il prit enfin la parole, visiblement las :

Elle hausse un sourcil, moqueuse. Quoi d'autre ? Il avait tué son amie. Comment aurait-elle pu lui pardonner ? Elle riait jaune, au fond d'elle. N'avait pas envie de rire. Plutôt envie de pleurer. Se cachait derrière sa colère pour ne pas céder. Elle l'avait aidé. L'avait guidé vers Odalys. Et il l'avait tuée. Il méritait sa haine et son cynisme. Il méritait sans doute bien plus. Le seul fait qu'Aurore ne soit pas quelqu'un de particulièrement violent le sauvait, l'épargnait. En réalité, elle aurait bien tout oublié. Arrêter de se battre. Arrêter de le haïr. Mais elle n'osait pas. Elle ne pouvait décemment pas se plaindre, exprimer ses sentiments à la source-même de sa tristesse. Il aurait pourtant sans doute pu être son auditeur... en d'autres circonstances.

Elle se cache derrière sa froideur, jouant distraitement avec le contenu de son verre, se voulant détachée :

Elle lui offre un sourire glaciale. Ses yeux ne sourient pas, eux, pourtant. Une boule se forme dans sa gorge. Elle la ravale d'une gorgée de vodka un peu trop lente pour paraître naturelle.